Guide d'action parlementaire à l'appui du désarmement, pour la sécurité et le développement durable

Le désarmement dans le monde de l’après-COVID-19

Dès le début de la propagation de la pandémie de COVID-19, en mars et avril 2020, il est rapidement apparu que les pays impliqués dans un conflit armé, de même que ceux qui avaient donné la priorité aux investissements de sécurité militaire, étaient moins à même d’endiguer et de traiter la pandémie que les pays qui avaient donné la priorité à des mesures de sécurité humaine et de développement durable, comme la santé publique et l’éducation.

Ni les armes nucléaires ni les armes et armées conventionnelles ne peuvent empêcher la propagation des maladies infectieuses. Elles ne sont d’aucune aide aux personnes infectées. Elles ne peuvent pas davantage réduire les conséquences économiques des pandémies, telles que les pertes d’emplois et de revenus. Elles n’aident pas non plus à reconstruire des économies pérennes quand le monde sort de la pandémie. En outre, la circulation des armes dans le monde, notamment des armes légères et de petit calibre, a tendance à exacerber les conflits armés et à entraver les efforts de paix. Il est pratiquement impossible de mettre en œuvre des mesures de santé publique au sein de populations touchées par des conflits armés, et donc de combattre une pandémie. De plus, par leurs effets et par l’utilisation abusive qui en est faite, les armes légères et de petit calibre pèsent sur des ressources de santé publique déjà trop sollicitées.

La pandémie de COVID-19 montre combien il est préférable d’investir en priorité dans la sécurité humaine plutôt que de renforcer la sécurité militaire. Il faudrait donc réorienter vers la santé publique et la mise en place d’économies résilientes une large part de l’exorbitant budget militaire qui atteint 1 900 milliards de dollars à l’échelle mondiale. La pandémie met aussi en évidence la nécessité d’investir d’urgence dans les processus de paix pour mettre fin aux conflits armés. C’est dans cette optique que le Secrétaire général de l’ONU a lancé, en mars 2020, un appel à un cessez-le-feu mondial, et a exhorté ses envoyés spéciaux à redoubler d’efforts pour faciliter les cessez-le-feu dans les régions en conflit. Le désarmement a un important rôle d’appui, dans la mesure où il contribue à contenir les conflits armés, à réduire les budgets militaires et à libérer des ressources pour la santé publique et la sécurité humaine.

Izumi Nakamitsu, Haute-Représentante de l'ONU pour les affaires de désarmement. Photo : Mark Garten (Service photographique de l'ONU)
Santé publique et armes explosives

Après l’utilisation d’armes explosives en zones peuplées, le système de santé de pays entiers s’est trouvé privé des moyens nécessaires pour combattre la pandémie. Les dépenses militaires mondiales atteignent des sommets cette année, alors que les gouvernements sont confrontés à un besoin urgent de ressources à réorienter vers la relance économique et la création d’emplois.

Izumi Nakamitsu, Haute-Représentante de l’ONU pour les affaires de désarmement, le 27 mars 2020.

La pandémie de COVID-19 met également en lumière l’importance de la Convention sur les armes biologiques ou à toxines (CABT) de 1972 ainsi que des mesures de prévention de la propagation des armes biologiques prévues par la résolution 1540 du Conseil de sécurité de l’ONU.

Certes, la pandémie n’a pas été déclenchée par la propagation intentionnelle du virus COVID-19 à des fins militaires, risque que la CABT et la résolution 1540 visent à prévenir et à combattre. Elle illustre néanmoins l’incidence catastrophique, sur le plan humanitaire et économique, de la propagation d’un nouveau virus, qui pourrait être utilisé à des fins militaires, et met en lumière la coopération mondiale et l’arsenal de mesures qu’il faudrait mettre en place, si un jour des armes biologiques étaient utilisées.

Jusqu’à présent, les gouvernements se sont montrés réticents à accorder à la CABT une attention et des moyens suffisants pour contrer efficacement la menace d’une guerre biologique. Il n’existe pas d’organe de vérification pour ce traité et les mesures d’application sont problématiques puisqu’elles dépendent du seul Conseil de sécurité de l’ONU et peuvent donc être bloquées par le veto de l’un de ses cinq membres permanents. La pandémie de COVID-19, qui met ces lacunes en lumière, pourrait conduire à une révision et à un renforcement de la convention sur les armes biologiques.

La CABT et la résolution 1540 sont à l’origine d’une expertise, de mécanismes de transparence et d’exemples de mesures efficaces de contrôle des agents biologiques et des toxines qui, dans l’intervalle, peuvent déjà contribuer à prévenir et à combattre les pandémies. Ce rôle pourrait encore être amplifié par une coopération renforcée entre les organismes de non-prolifération et de désarmement et les organes de santé publique aux niveaux international et national.

Cette page fait partie du guide d'action parlementaire "Défendre notre avenir commun".
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