En janvier 2020, les experts du Bulletin of Atomic Scientists ont, à nouveau, avancé l’aiguille de la symbolique « horloge de l’apocalypse » pour la placer 100 secondes avant minuit, plus proche que jamais de la possible fin de la civilisation. À l’appui de cette décision, ces éminents spécialistes ont invoqué deux dangers qui menacent en parallèle l’existence de l’humanité : la guerre nucléaire et les changements climatiques. La menace nucléaire s’intensifie en effet avec la dislocation des accords de contrôle des armes nucléaires, le développement de nouveaux systèmes d’armement par les États qui détiennent des armes nucléaires et l’exacerbation des conflits entre ces États. Dans le même temps, le budget consacré par les gouvernements aux armements et aux forces armées est de près de 2 000 milliards de dollars par an, tandis que les armes légères et de petit calibre en circulation dans le monde, dont le nombre dépasse le milliard, sont responsables de la mort de quelque 220 000 personnes chaque année.
S’il en était besoin, la pandémie de COVID-19 a montré que ni les armes nucléaires ni les armements et armées conventionnelles ne peuvent empêcher la propagation des maladies infectieuses, pas plus qu’elles ne peuvent réduire leurs effets sur la santé publique et les économies. De fait, la circulation des armes a plutôt tendance à envenimer les conflits armés et à entraver la mise en œuvre des mesures de santé publique nécessaires pour faire face à de graves pandémies.
Les armes nucléaires, les armes classiques et les grandes armées ne contribuent pas non plus à la lutte contre les changements climatiques, ni à la réalisation des objectifs de développement durable. Les opérations militaires comptent d’ailleurs parmi les plus importantes sources d’émission de carbone. Tandis que l’on peine à financer la mise en œuvre des Objectifs de développement durable (ODD), les gouvernements disposent toujours de budgets militaires démesurés. La lutte contre les changements climatiques et la réalisation des ODD sont mieux défendues par le désarmement, la diplomatie et la résolution des conflits que par la poursuite de la militarisation.
L’action parlementaire est un levier essentiel pour obtenir un transfert des priorités de sécurité nationale axées sur la sécurité militaire vers la coopération et la sécurité humaine. L’engagement parlementaire est indispensable à la promotion des orientations clés développées par le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, dans son programme de désarmement, Assurer notre avenir commun, ainsi qu’à l’efficacité et à la pérennité des politiques et initiatives de désarmement.
C’est en effet aux parlementaires et aux parlements qu’il incombe d’autoriser la ratification des accords de désarmement et d’adopter les mesures de transposition au niveau national, de voter les budgets à l’appui du désarmement, de contrôler la réalisation des engagements de désarmement, de promouvoir des politiques et des pratiques exemplaires, et d’entretenir la coopération des parlementaires et des parlements à l’échelle régionale et mondiale.
Ce guide propose des exemples de bonnes pratiques et formule des recommandations pour aider les parlementaires à agir, à faire véritablement la différence dans le but de défendre notre avenir commun.
Le rôle des parlements
Les parlements, en leur qualité de représentants directs des citoyens, ont à la fois des fonctions de normalisation et de contrôle. Ils sont en mesure d’exercer des pressions morales, budgétaires et législatives pour s’assurer que les gouvernements font progresser le monde vers l’élimination totale des armes nucléaires.
Les parlementaires ont créé des réseaux internationaux qui ont efficacement promu le désarmement et la non-prolifération à l’échelle mondiale, non seulement pour les armes nucléaires, mais aussi pour toutes les armes de destruction massive, et d’autres armes jugées inhumaines, comme les mines et les bombes à sous-munitions.
Izumi Nakamitsu, Haute-Représentante de l’ONU pour les affaires de désarmement, lors du symposium parlementaire de Nouvelle-Zélande, le 10 mars 2020. Photo : Mark Garten (Service photographique de l’ONU)